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Un important soutien des National Institutes of Health pour étudier de nouvelles façons de cibler la leucémie myéloïde aiguë

Publié le 20 janvier 2022

La professeure Katherine Borden, chercheuse principale qui dirige l’unité de recherche en structure et fonction du noyau cellulaire de l’IRIC, a reçu une subvention d’une valeur de 1,47 million de dollars américains (1,85 million de dollars canadiens) sur cinq ans. Le financement octroyé par les National Institutes of Health (NIH), principal organisme subventionnaire de la recherche biomédicale aux États-Unis, soutiendra son projet de recherche visant à élucider les mécanismes moléculaires de transformation tumorale médiée par la protéine eIF4E.

 

Le projet subventionné explorera de nouveaux rôles de l’oncogène eIF4E dans le traitement des ARN messagers, des molécules intermédiaires transcrites à partir de l’ADN et destinées à être traduites en protéines. Par un processus nommé épissage, les ARN messagers sont réarrangés afin de générer différentes protéines. Des travaux du laboratoire Borden ont montré que la protéine eIF4E, dérégulée dans de nombreux cancers, en plus de contrôler la traduction des ARNs en protéines, peut moduler l’épissage des ARN messagers. Par l’étude de modèles de laboratoires et d’échantillons de personnes leucémiques, l’équipe a effectivement découvert de nouvelles interactions et points de contrôle impliquant eIF4E dans l’épissage des ARNs. Cette réécriture du protéome (ensemble des protéines) dépendante d’eIF4E confère des propriétés cancéreuses aux cellules. Les fonds obtenus permettront de décortiquer les mécanismes moléculaires à l’œuvre dans ce nouveau rôle d’eIF4E. Une meilleure compréhension de ces voies moléculaires pourrait révéler de nouvelles opportunités thérapeutiques.

 

La professeure Borden a accepté de répondre à quelques questions en lien avec l’octroi de cette importante subvention :

 

Comment en êtes-vous venue à étudier la protéine eIF4E?

 

Katherine Borden (K. B.) : J’étudie eIF4E depuis 23 ans! Je m’y suis d’abord intéressée pour des raisons un peu obscures qui ont à voir avec le virus de la fièvre de Lassa, maladie présente en Afrique de l’Ouest. La protéine eIF4E est surexprimée, donc présente en quantité plus élevée que la normale, dans environ 30% des cancers, notamment dans la leucémie myéloïde aiguë (LMA). Mon laboratoire a été le premier à cibler eIF4E chez l’humain, et donc le premier à démontrer la pertinence clinique d’eIF4E comme cible thérapeutique. Nous avons également découvert par hasard de nouvelles fonctions d’eIF4E qui supportent ses capacités cancérigènes. Cette découverte nous a menés vers l’étude du rôle d’eIF4E dans le traitement des ARN messagers, c’est-à-dire dans la façon dont ces messagers envoyés par l’ADN sont modifiés chimiquement pour changer le protéome.

 

Quels sont les objectifs du projet financé?

 

K. B. : Nous avons découvert qu’eIF4E pouvait contribuer au cancer d’une façon complètement différente. En fait, nous avons trouvé que le processus d’épissage (une des étapes de maturations des ARNs) lui-même pouvait être régulé de manière insoupçonnée. Nous avons observé que l’épissage de milliers d’ARNs est altéré de façon eIF4E-dépendante dans des échantillons de patientes et de patients atteints de la LMA.

 

Dans le cadre du projet financé, nous allons déterminer les bases moléculaires de cette dérégulation de masse dépendante d’eIF4E, de même que la façon dont elle soutient son activité cancérigène. Nous utiliserons une combinaison de méthodes de biologie structurale et de biochimie pour décortiquer les rouages de l’association d’eIF4E avec le splicéosome (complexe moléculaire responsable de l’épissage des ARNs). Nous réaliserons également des expériences en cellules pour identifier les caractéristiques d’eIF4E qui sont nécessaires à sa fonction d’épissage. Nous tenterons aussi de déterminer de quelle façon tirer parti de nos nouvelles connaissances pour traiter les malades atteints de formes de LMA dans lesquelles eIF4E est surexprimée. En nous basant sur nos résultats, nous étudierons de nouvelles combinaisons de traitements ayant un potentiel thérapeutique prometteur.

 

Qu’est-ce que cette subvention change pour vous et votre laboratoire?

 

K. B. : Elle nous fournira de nouvelles ressources pour étudier les processus qui nous intéressent. Recevoir du financement des NIH en tant que chercheuse ou chercheur étranger est très difficile. Le taux de succès des chercheuses et chercheurs américains n’est que de 11%. Ce financement est essentiel à la poursuite du projet. La subvention soutiendra également ma collaboratrice, la professeure Monica Guzman de l’institut Weill Cornell Medicine de New York. Avec cette subvention, nous aurons les fonds requis pour faire avancer nos travaux de recherche.