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Hyperactivation de la voie NOTCH1 dans la leucémie aiguë lymphoblastique à cellules T : deux publications récentes apportent un nouvel éclairage

Publié le 27 June 2022

La leucémie aiguë lymphoblastique à cellules T (T-ALL) est une forme agressive de leucémie qui nécessite des traitements intensifs de chimiothérapie. Chez les personnes atteintes, les thymocytes (des lymphocytes T immatures) prolifèrent de façon incontrôlée et envahissent le système sanguin, nuisant à ses fonctions normales. Au niveau moléculaire, des mutations récurrentes touchant des gènes forgeant le devenir de la cellule favorisent le développement de la T-ALL. Parmi les facteurs identifiés, NOTCH1 est celui qui est muté le plus fréquemment, chez les enfants comme chez les adultes atteints de T-ALL. Un gain de fonction de NOTCH1 active différentes voies de signalisation supportant la croissance, la prolifération et la survie des cellules leucémiques. Étant donné son rôle central dans le développement de la T-ALL, cibler NOTCH1 et ses effecteurs est une approche thérapeutique prometteuse.

L’équipe de Trang Hoang, directrice de l’unité de recherche en hématopoïèse et leucémie de l’IRIC, s’est intéressée à l’hyperactivation de NOTCH1 dans la T-ALL. Le travail de Diogo Veiga, postdoctorant désormais professeur de génomique et bio-informatique à l’Universidade Estadual de Campinas au Brésil, et Mathieu Tremblay, conseiller à la recherche, a permis la publication de deux articles.

« Diogo et Mathieu ont énormément de talent. Diogo est un bio-informaticien avec un penchant pour l’immunologie et Mathieu est un biologiste moléculaire avec un penchant pour la génétique et la leucémie. Leur complémentarité est à l’image de celle de l’IRIC! » – Trang Hoang.

 

Un rôle de suppresseur de tumeur pour HEB identifié par des analyses bio-informatiques et protéomiques

Le fait qu’environ un tiers des cas de T-ALL n’impliquent aucune altération du gène NOTCH1 suggère que d’autres voies sont impliquées dans le développement de la pathologie. Les données massives de génomique fonctionnelle qui sont disponibles publiquement ont été analysées judicieusement par Diogo Veiga de façon bio-informatique, générant de nouvelles hypothèses qui ont ensuite été discutées à fond et testées rigoureusement par Mathieu Tremblay et les autres membres de l’équipe. C’est ainsi que le groupe du laboratoire Hoang a identifié le rôle primordial du facteur de transcription HEB dans le développement de la T-ALL. Leur étude, publiée dans Frontiers in Immunology, révèle un rôle de suppresseur de tumeur pour HEB, qui agit en freinant la prolifération des cellules souches pré-leucémiques et la progression de la T-ALL induites par NOTCH1.

Contrairement aux suppresseurs de tumeurs conventionnels, ce n’est pas l’altération du gène de HEB qui promeut le développement de la T-ALL. Les résultats de l’équipe montrent que la perte de fonction de HEB est plutôt contrôlée au niveau protéique, révélant un mécanisme distinctif difficilement identifiable par des analyses génomiques à grande échelle. Ces résultats soulignent la nécessité d’intégrer des approches multidisciplinaires pour l’étude des cancers.

 

Cibler des voies métaboliques en aval de NOTCH1 pour améliorer les traitements

Le développement d’inhibiteurs de NOTCH1 est compliqué par l’acquisition de résistance et par une faible tolérance. Une approche alternative serait de cibler des voies métaboliques en aval de NOTCH1. Un projet collaboratif et multidisciplinaire impliquant l’équipe de Trang Hoang s’est penché sur la question, avec l’objectif d’identifier des inhibiteurs ciblant les voies métaboliques reprogrammées par l’hyperactivation de NOTCH1. Leur travail a été publié dans le journal Nature Communications.

La phosphorylation oxydative est une voie métabolique utilisée par les cellules leucémiques pour combler leurs besoins en énergie et en biosynthèse. Dans leur étude sur la T-ALL, les chercheurs et chercheuses ont observé que la perturbation de la phosphorylation oxydative inhibe la croissance tumorale. Cette inhibition pousse les cellules vers une voie métabolique alternative : la glutaminolyse. En ciblant simultanément les deux voies, l’équipe a observé un effet synergique permettant de freiner efficacement la T-ALL dans des modèles pré-cliniques mutés pour NOTCH1. La dépendance métabolique de la T-ALL envers la phosphorylation oxydative pourrait donc être exploitée thérapeutiquement.

 

Études citées

Veiga FT Diogo*, Tremblay Mathieu*, Gerby Bastien, Herblot Sabine, Haman André, Gendron Patrick, Lemieux Sébastien, Zúñiga-Pflücker Juan Carlos, Hébert Josée, JP Cohen, and Hoang Trang. Monoallelic Heb/Tcf12 Deletion Reduces the Requirement for NOTCH1 Hyperactivation in T-Cell Acute Lymphoblastic Leukemia. Frontiers in Immunology. 2022. 13: 867443.  PMID: 35401501 (*equal contribution)

Baran N, Lodi A, Dhungana Y, Herbrich S, Collins M, Sweeney S, Pandey R, Skwarska A, Patel S, Tremblay M, Kuruvilla VM, Cavazos A, Kaplan M, Warmoes MO, Veiga DT, Furudate K, Rojas-Sutterin S, Haman A, Gareau Y, Marinier A, Ma H, Harutyunyan K, Daher M, Garcia LM, Al-Atrash G, Piya S, Ruvolo V, Yang W, Shanmugavelandy SS, Feng N, Gay J, Du D, Yang JJ, Hoff FW, Kaminski M, Tomczak K, Eric Davis R, Herranz D, Ferrando A, Jabbour EJ, Emilia Di Francesco M, Teachey DT, Horton TM, Kornblau S, Rezvani K, Sauvageau G, Gagea M, Andreeff M, Takahashi K, Marszalek JR, Lorenzi PL, Yu J, Tiziani S, Hoang T, Konopleva M. Inhibition of mitochondrial complex I reverses NOTCH1-driven metabolic reprogramming in T-cell acute lymphoblastic leukemia. Nature Communications. 2022;13:2801